Kabicha 22 Me a
22 mai 2010
22 Mai 1848
Secouer l’histoire, en Martinique
L’histoire de l’esclavage euro-américain, en tant qu’elle est et pour autant qu’elle n’est qu’un récit de faits lointains, mobilise des ressources mémorielles trop racialement connotées pour échapper au délire raciste et paternaliste des héritiers du colon européen et/ou au cynisme parfois angélique, parfois commémoratif, des descendants (ou proclamés descendants) des anciens captifs africains.
Un récit suppose un style, un déroulé, une vision du monde, weltanschauung, un ordonnancement chronologique, un we-feeling et/ou we-love together, un a na kalina’ote et/ou nou menm ki nou menm lan, bref le récit de l’esclavage euro-américain est, intrinsèquement, la construction d’un phénotype. Le récit caribéen de/sur l’esclavage euro-américain obéit à cette logique d’une construction ethno-centrée et des lieux-communs tapissent, densément, une mémoire qui veut oublier, au plus vite. Les acteurs d’en-Martinique, comme ceux du Brésil, Dominique, Cuba, Guadeloupe, Guyane, Haïti, ou Trinidad, ont raconté la même histoire d’un système d’exploitation et de déshumanisation qu’ils ont prétendu fonctionnel, parfois même rationnel. C’est que, d’après le récit, ils étaient nés, en tant que communauté humaine, en tant que peuple même, hier noir, dorénavant créole (à l’exception de la Jamaïque), dans l’intimité de ce système. Cette "conscience raciale" (parfois une blackness attitude, - "blackism will save the world"-, parfois une négritude césairienne inconsolée qui fossilise, parfois un métissage créole terriblement essentialiste, parfois un bouillon euro-créolo-négro-débile, l’outremer à deux/trois/quatre bonda) dont Frantz Fanon avait montré les nombreuses insuffisances, a donné, elle-même, une lecture totalement erronée et pathétique du phénomène esclavagiste euro-américain, une mal-pensée dangereusement holiste qui asséchait toutes les résistances qui y avaient circulé. Renversant, à peine, la vision esclavagiste et coloriste des fin 17e, 18e et début 19e siècles, cette "conscience raciale", comme d’un véritable défi cynique (soit un cynisme angélique où l’on positive, en l’inversant, une construction raciste européenne, celle d’une proximité nègre avec la nature, soit un cynisme commémoratif où le descendant d’esclave revendique des ancêtres glorieux, pharaons constructeurs de pyramides, dans les sables de Ta-Khenes, la "terre courbée" (Wawat et Koush), et autres inventeurs nègres des sciences, le bâton d’Ishango, les écritures akwaba, arako, et nsibidi, les cités-états de Brass, Calabar, Ilfe, Nupe (berceau du bèlè), parfois même Zimbabwe, eybibimáń !), simplifie maladroitement et dangereusement. Parfois, elle comprend bien la spécificité de l’esclavage euro-américain mais n’arrive jamais à intégrer la diversité et la complexité des formations esclavagistes euro-américaines, ni à donner sa vraie place aux résistances et notamment les résistances territorialisées qui ont formé les identités et consciences caribéennes modernes. Les documents des esclavagistes d’hier (livres de compte, correspondances européennes transatlantiques, lettres de péripatéticiennes arrachées à la misère sexuelle des grands ports européens, divagations des diables-sourds de la catéchèse, ivresse d’exotisme de philosophes et amis des noirs, etc.) avaient servi d’appui au récit historique d’en-Guadeloupe et d’en-Martinique. Seuls les historiens caribéanistes avaient fouillé ailleurs, dans les refrains des Abakuá, Aguinaldo, Bèlè, Bomba, kaladja, Nyabinghi, Rara ; les contes, les titim-bwa-sek, les Myal, les chorégraphies des kalennda, ladja, djouba, kumina, masumba, lalin-klè, plena, pukkumina, Rumba, Samba, Sarandunga, yanvalou, Yubá, etc. Tous ces témoignages d’une vitalité de résistances, territorialisées ou non, ré-humanisant, qui étaient ignorés par une construction historique trop linéaire qui reproduisait, bondamannimannan, jusqu’au discours coloriste des 18e et 19e siècles, français. L’autre insuffisance forte de cette "conscience raciale" c’est cette démonstration d’un "système esclavagiste". Sans mémoire, la formation esclavagiste, ne pouvait avoir fait système puisque un système suppose une autonomie des acteurs d’où le changement social. Or les "maîtres" de la formation esclavagiste avaient été totalement dépendants des bourgeoisies des grands ports européens ; or, dans la formation esclavagiste, le changement social avait été bloqué par l’idéologie coloriste. Cette affirmation d’un système esclavagiste empêche, notamment, de comprendre la diversité des formations esclavagistes ; la formation esclavagiste française avait été très différente de la formation esclavagiste espagnole, celle là même où un esclave (un viejo) pouvait venir plaider la cause d’un autre esclave ou négocier le retour d’un nèg-mawon (un cimarron) dans la plantation esclavagiste ; ou encore de l’anglaise, celle là même où le Congo Square du dimanche après-midi avait permis une accumulation, certes limitée mais fondée historiquement, de ressources matérielles, culturelles, spirituelles, doucement politiques parfois et, au fond, une mémoire de transmission ; très loin de la portugaise/brésilienne, celle là où le métissage (a miscigenaçāo leal) avait été comme un recours à la disparition fantasmée du peuple, Xica da Silva, reine toute beauté, ô koukoun-chatrou, du milieu du 18e siècle. Autrement, la formation esclavagiste française, en Martinique, devrait être distinguée, de la formation esclavagiste française, en Guadeloupe. La Guadeloupe avait même connu sept ans d’une quasi-autonomie politique et institutionnelle (1795-1802), et çà c’est une ressource politique, et la Martinique, dans la même période, la férocité, ben quoi, avait filé à l’anglaise. Et dans cette même formation esclavagiste française d’en Guadeloupe, peut-être qu’une habitation, Les Roses, avait permis la circulation de ce son singulier de la Nation Ibo qui avait engendré le rythme le plus complexe des sept rythmes du gwo-ka guadeloupéen, le lewòz. Le rythme toumblak hérité des ashantis (akan) avait, quand même, dominé les six autres ; et les bèlè de là-bas avaient continué les chants du travail quotidien haoussa. Les Bèlè-Bizoden avaient décomposé/recomposé les danses de Nupe au son du tambour djouba ; bèlè-lisid, les lasotè du Morne-vert ou les lawviè-leza et autres mayonmbe, lavwa-bèf, autant de manifestations d’une diversité soit des résistances, soit des organisations périphériques structurantes (sous-systèmes), soit des nouvelles résistances territorialisées en sorte d'une relecture caribéenne de toutes les subcultures africaines, soit une lecture post-esclavagiste des organisations périphériques structurantes et des organisations périphériques dé-structurantes/re-structurantes (contre-systèmes), et ré-humanisant, de la période esclavagiste. Une organisation périphérique ré-humanisant le libre-de-savane, l’affranchi, le nèg-mawon (contre-système en langage simplifié) était produite par des acteurs autonomes ou en situation d’autonomie ; une organisation périphérique structurante (sous-système dans un système moderne) était produite par des figurants, des gens en situation de dépendance, l'esclave. La formation esclavagiste euro-américaine était un lieu de complexités où les organisations périphériques structurantes et les organisations périphériques ré-humanisant l’africain avaient été autant de paliers vers une résistance territorialisée.
1- La spécificité de l’esclavage euro-américain. Frantz Fanon avait déjà résumé cette spécificité par une de ces formules autant laconiques qu’incisives dont il avait la science, "sous l’esclavage, les romains étaient restés des hommes". Cette formule fanonienne inspire plusieurs postulats : Toutes les sociétés avaient connu, à un moment ou un autre de leur histoire, une organisation esclavagiste (marchandisation d’êtres humains, généralisation du travail déshumanisant et absence de salariat) mais l’esclavage euro-américain avait été la seule formation esclavagiste où maître/contremaître et esclave n’avaient pas appartenu à la même civilisation, au même espace/temps originel, au même socle identitaire d’où la création d’une hiérarchie raciale qui avait légitimé l’ordre social esclavagiste et post-esclavagiste, la domination "raciale" contemporaine. Toutes les sociétés avaient connu, à un moment ou un autre de leur histoire, une organisation esclavagiste mais l’esclavage euro-américain avait été la seule formation esclavagiste où des Etats européens, modernes, avaient régulé un ordre racial pervers et un génocide, la maafa. Que l’on me comprenne bien, la maafa n’avait pas été programmée mais la démesure de la mortalité liée à la traite puis à la condition servile elle-même, autorise la notion de génocide. Toutes les sociétés avaient connu, à un moment ou un autre de leur histoire, une organisation esclavagiste mais l’esclavage euro-américain avait été la seule formation esclavagiste où des Etats européens, avaient régulé une marchandisation d’êtres humains et leur déshumanisation. Dans l’esclavage transsaharien, par exemple, aucun édit n’avait institué un code noir, une chartre pour organiser le commerce et la déshumanisation de millions d’hommes. C’est la régulation d’un Etat moderne qui avait pérennisé la formation esclavagiste et l’avait fait passer d’une aventure à une quasi-société, c’est la régulation d’un Etat qui avait permis la durabilité d’un ordre esclavagiste et la permanence du discours raciste. Toutes les sociétés avaient connu, une organisation esclavagiste mais seule la formation esclavagiste euro-américaine avait construit un paysage, parfois un territoire, jusqu’à un pays sur une monoculture (canne à sucre, ou café, ou coton, etc.) qui avait appauvri la terre et épuisé toutes les ressources culturelles, spirituelles, politiques, etc. Dans la formation esclavagiste euro-américaine, seul le mode de production esclavagiste avait été légal. Ailleurs, des formations précapitalistes avaient concurrencé le mode de production esclavagiste et précipité sa fin. Toutes les sociétés avaient connu, à un moment ou un autre de leur histoire, une organisation esclavagiste mais l’esclavage euro-américain avait été la seule formation esclavagiste où un Etat d’outremer et moderne, avait organisé une hyper-dépendance économique, sociale, culturelle et politique. Seule la formation esclavagiste euro-américaine avait été construite autour d’un projet colonial, pour satisfaire les seuls besoins d’un marché (capitaliste) européen. Toutes les sociétés avaient connu à un moment ou un autre de leur histoire, une organisation esclavagiste mais la formation esclavagiste euro-américaine avait été la seule à avoir intégré des accessoires de gestion capitaliste (l’extraversion de la production, hiérarchisation, la permanence du marché, la propriété privée des biens et moyens de production, transformation industrielle, etc.) qui avaient créé une redoutable culture du déclassement systématique. Cette spécificité de la formation esclavagiste euro-américaine doit être adossée au phénomène de la traite euro-atlantique mais il faut distinguer la traite atlantique de l’esclavage euro-américain puisque la formation esclavagiste euro-américaine avait survécu à la traite atlantique. Cette dernière et plus généralement le commerce triangulaire, était bien l’essence de l’esclavage euro-américain. Ce sont des Etats européens qui avaient permis à la traite de passer de la folle aventure au commerce triangulaire hyper-génocidaire ; pour un captif ouest-africain débarqué en Amérique, quatre personnes avaient été tuées. C’est ainsi qu’un peu plus de 75 millions de personnes avaient été frappées du "maléfice d’indignité humaine". Et jusque dans la première moitié du 18e siècle, sur cent captifs vendus dans les plantations américaines, 80 mourraient dans les deux premières années de travail servile. La mortalité, pendant la traversée, passa de 60/75% à 25/35% quand l’igname, discorea alata, fut introduite dans l’alimentation des captifs ; et dans le marché aux légumes de La Trinité Martinique, la revendeuse flattée de la présence de touristes français s’était exclamée "qui m’a mandé le yam ?" halant au plus profond d’elle-même ce vocable ashanti et haoussa, yam, ou yamyam, (déguster un aliment), qui avait sauvé des millions d’africains d’un destin de forêt corallienne atlantique ou du festin des requins. Seuls survivaient ceux dont l’organisme avait réussi à fixer le sel d’où la trop forte exposition à l’hyper tension artérielle dans les populations afro-américaines aujourd’hui alors que dans les populations africaines natives cette hypertension artérielle restait, d’après des statistiques officielles, dans une juste normalité. Et à la télé française en Martinique, Monique ou Serge, toujours trop hardis sur la question raciale déclaraient l’hypertension "maladie des noirs", tu ris, tu ris là, mademoiselle Beliya Tayfon, mais ri diri plere lantiy. 2- La diversité des formations esclavagistes euro-américaines. La notion de "système esclavagiste" me semble inappropriée, ici, même si des Etats modernes avaient régulé la formation esclavagiste euro-américaine. C’est que les acteurs, les esclavagistes (les maîtres, contremaîtres, administrateurs, clergés et péripatéticiennes) étaient démesurément euro-dépendants ; quand aux figurants (les affranchis, les hommes de couleur libres et les esclaves), ils étaient doublement dépendants dans une formation esclavagiste, en dépendance. Le lieu américain (" América es un continente", proteste Ruben Blades, dans Buscando América) n’avait pas, en tout cas dans la formation esclavagiste française, refondé les premières identités africaines et seules les résistances territorialisées entretenaient le flambeau de la rationalité et de la liberté. Un système eût supposé une autonomie et une rationalité des acteurs. Dans l’hyper-dépendance martiniquaise contemporaine, la plantocratie qui sert de bourgeoisie n’est ni autonome, ni rationnelle, elle n’a pas réussi à faire mieux que l’économie de comptoir. Toute liberté de l’esclave supposait une négation de la formation esclavagiste euro-américaine. La notion de système serait donc terrible ici, elle assécherait les résistances qui y ont circulé, ici, là-bas, an tjou man deviran, les posant comme les seuls sous-systèmes et/ou contre-systèmes. La notion de système empêcherait de distinguer le petit marronnage individuel et ponctuel (anni katjile’w, an wawa ki te ke chape kò’y ale mande an fanm rete asou anlot bitachon, koke dou, misie fouben wouchin la) du grand marronnage collectif et permanent qui ré-humanisait. Or en Martinique, par exemple, pendant tout le 18e siècle, les gouverneurs qui s’y étaient succédés, avaient déploré une population permanente de 7 à 800 nèg-mawon. Cette notion de système esclavagiste noierait les résistances territorialisées dans une pratique généralisée et floue du marronnage. Or tout au long du 18e siècle, le Conseil Souverain avait appelé à la constitution de milices pour détruire des villages de nèg-mawon, sur les hauteurs du Gros-Morne, de Trinité, de Sainte-Marie, dans les bois de l’Ajoupa, du Morne-Rouge, du Morne-Vert, du Marin ou de Rivière-Pilote et même sur le littoral Atlantique, Tou Chen. La plus impressionnante de ces expéditions fut celle de 1709 qui avait mobilisé 425 miliciens et la plus célèbre fut celle de 1763 conduite par un certain Mercier de la Rivière qui détruisit un village marron dans l’actuel Bwa-Leza (Trinité/Gros-Morne), la milice avait alors enrôlé 300 à 400 sbires de l’esclavagisme. En en 1654, Du Tertre, un abbé chroniqueur, avait témoigné de cette alliance militaire entre caraïbes et nèg-mawon pour attaquer Saint-Pierre ; et en 1665, Francisque Fabulé avait levé une armée de 400 nèg-mawon qui avait sévi, rache-koupe, dans la région de Saint-Pierre. Tous ces faits ne peuvent être rangés dans la même rubrique avec les marronnages individuels et temporaires ou les petits jardins d’esclave, etc. Toutes les formations esclavagistes euro-américaines, du Sud des Etats-Unis au Brésil, en passant par Cuba, Haïti ou Martinique, Saint-Vincent, Trinidad, ont produit des organisations périphériques structurantes et/ou dé-structurantes/re-structurantes, toutes, participant d’une lente ré-humanisation de l’africain. Selon le niveau de souplesse de la formation esclavagiste euro-américaine et les possibilités d’accès aux ressources culturelles, matérielles, militaires, spirituelles, la population servile avait privilégié certaines formes de résistance. En règle générale, les conflits entre puissances esclavagistes ont favorisé les résistances territorialisées, La République de Palmares, Brésil-1630-1695, La Communauté des Marroons of Jamaica, vers 1730, Le Maniel, Haïti, 1730, le royaume de Miguel, le république de Para, vers 1820, etc. Dans la formation esclavagiste anglaise où un droit à la famille avait été, officieusement, reconnu à l’esclave, où un Congo Square avait fonctionné comme sortie possible de la condition servile, le marronnage individuel, les révoltes et les suicides (même si c’était le mode de résistance le plus usité des Ibo) étaient moins fréquents. Dans la formation esclavagiste portugaise/brésilienne où en moyenne, au 18e siècle, 41% des esclaves étaient mariés, où l’on avait recensé plus d’un millier de quilombo, où la forêt dense, amazonienne avait protégé les quilombo et où une espèce de droit de grève avait même existé (les rebellions des musulmans de Bahia entre 1808 et 1835), et où les relations "trans-raciales" et les religions africaines avaient circulé, pianmpianm, le marronnage individuel et les suicides avaient été rares mais le grand marronnage collectif avait été une vraie "culture". Dans les formations esclavagistes espagnoles où un esclave pouvait négocier son retour sur la plantation après une période de marronnage et où les religions africaines, la religion Lucumi (ibo), la religion yorouba (vodou) et le Palo Monte (Congo), étaient plus ou moins tolérées, les Palenques firent légion, les révoltes et suicides furent également rares. Dans la formation esclavagiste française où la barbarie avait régné (dans les plantations du sud des Etats-Unis, les contremaîtres menaçaient les esclaves récalcitrants "to banish them in Martinique", c’est dire la scélératesse de ces yich-man-bans) où les contremaîtres violaient les petites négresses, où les mutilations des esclaves étaient fréquentes, où l’évangélisation catholique avait diabolisé les religions africaines, les marronnages individuels ou collectifs étaient fréquents et désordonnés, les suicides, les révoltes (plus d’une centaine au 18e siècle), les empoisonnements, les complots d’esclaves avaient secoué la quasi-totalité des habitations. 3- Une résistance territorialisée. Plus qu’une organisation périphérique dé-structurante/re-structurante (contre-système), cette résistance territorialisée (grand marronnage collectif, les communautés libres, bandes d’esclaves, Palenque et Quilombo,) avait projeté l’ancien esclave, l’affranchi, le descendant du nèg-mawon, l’avait ré-humanisé ; c’étaient donc des formations sociales et politiques. Ces résistances territorialisées s'étaient concrétisées à la suite d’une évasion massive lors de conflits armés entre puissances coloniales européennes. Les évadés élisaient des leaders, construisaient des cases (une trentaine au maximum, en général) organisaient des cultures vivrières (un jardin caraïbe, lieu d’une diversité et en opposition avec la plantation) et se préparaient à affronter les milices esclavagistes. Cette résistance territorialisée était une action collective qui s’inspirait de l’organisation des cités-états africains (Brass, Calabar, Ilfe, Nupe,) notamment dans le cas des Républiques de Palmares (plus de 30.000 personnes) et de Para (environ 20.000 personnes) du Royaume d’Ambrosio ou Quilombo Grande (un peu plus de 10.000 personnes) et intégrait l’africain dans son nouveau milieu américain. La République de Palmares avait fédéré une soixantaine de macombos, frappé une monnaie, levé un impôt, construit des écoles, inventé l’économie solidaire, à chacun selon ses besoins, et la stratégie de la guérilla et la guerre souterraine. La République de Para créée en 1820 par un cafuzo, Anastasio, avait exporté ses productions de cacao et autres produits d'artisanat vers la colonie hollandaise frontalière. La communauté Le Maniel (environ 7.000 personnes) dirigée par Santiago dans Haïti du 18e siècle s’était organisée sur la frontière entre les deux colonies, dans les montagnes près de Baroruco, de telle sorte que quand les français attaquaient, toute la communauté se réfugiait côté espagnol et revenait aussitôt la milice française partie, elle vendait des produits de son jardin caraïbe aux espagnols. Des 62 Palenques qui ont occupé Cuba au 18e siècle (d’après une étude de Gabino de la Rosa Corzo) la Palenque Bumba près de Santiago de Cuba avait été la plus célèbre, cette communauté avait commercé, par canots de marchandises, avec la Jamaïque et Hispaniola. Elle fut organisée autour de six petits villages d’une dizaine à trentaine de cases selon le témoignage du rancheador F. Estévez.. Dans les Petites Antilles où malgré le relief avantageux la longévité et/ou la durabilité des communautés libres avaient été faibles, les bandes d’esclaves notamment à partir de 1794 étaient la forme de résistance projetée la plus développée. Benjamin Nistal Moret qui a étudié le phénomène du marronnage à Puerto Rico, a montré que des bandes de cimarrones étaient constituées de personnes originaires de Saint Thomas, Cuba et Hispaniola. Dans la Martinique du 18e siècle, la plantation avançait et avalait goulument la forêt centrale (l’ensemble pitons du Carbet et Montagne Pelée), la constitution d’une résistance territorialisée était, sans doute, devenue de plus en plus difficile, les bandes de nèg-mawon ont pallié ce déficit de territoire. En 1832, une bande de 200 nèg-mawon divisée en quatre sous-groupes s’était mobilisée en Guadeloupe, et la célèbre bande de nèg-mawon de Martinique, celle de Francisque Fabulé, avait produit des mobilisations contre la formation esclavagiste pendant cinq années dans la région de Saint-Pierre, vers 1665. Mais cette bande de nèg-mawon tournait en rond dans le vol, le pillage, la destruction ; sans territoire fixe, elle ne pouvait refroidir la violence et se faire communauté politique. La formation esclavagiste euro-américaine était inscrite dans cette hyper-dépendance de l’économie de comptoir, elle ne produisait que pour un marché européen, lointain et obscur et ne consommait que des salaisons (djel-poliyis et latje-kohon) et produits finis importés d’Europe. Les résistances territorialisées, en tant et pour autant qu’elles étaient des résistances projetées, ont travaillé fiévreusement à endiguer cette hyper-dépendance dans la diversité d’un jardin caraïbe et d’une réappropriation/transformation du "faire-technique" yorouba ou ashanti. Marroons Accompong et Maroons Leeward d’en Jamaïque, Le Maniel d’en Haïti, Bwa-Leza d’en-Martinique, Palenque-Bumba de Cuba, O Quilombo dos Palmares do Brasil, et tant d’autres, autant de cri d’une humanité dont les générations nouvelles n’ont pu recomposer l’écho. Simao moun Wanakera
LA CRISE DE MAI 1967 EN GUADELOUPE
organisée par Amitié Marie-Galantaise/ARMADA
Cette 4 ème conférence animée par José VATIN et son invité Serge GLAUDE.
Guadeloupéen, membre fondateur du GONG, de l’UTA, l’UPG, l’UGTG et l’UPLG aux côtés de Sony Rupaire, membre du collectif lkp.
Samedi 29 mai 2010
de 13h45 à 17h 30
Maison des Associations du 14ème 22, rue Deparcieux 75014 Paris Métro : Denfert-Rochereau
Rédigé par : A.M.G | 23 mai 2010 à 13:19
J'aimerais bien trouver des références sur le quilombo de Palmares, si ça a existé, il doit bien y avoir des livres, des films, des musiques sur ce fameux quilombo. Sinon très bonne réflexion mais où est votre bibliographie, vous citez des auteurs, mais vous êtes avare en référence.
Rédigé par : Jane Caraïbe | 24 mai 2010 à 08:06
C'est trop long et avec des mots trop difficile ! En créole c'est trop difficile à lire, en français c'est déroutant.
Rédigé par : Alicia | 24 mai 2010 à 10:53
"Maafa" man li mo tala adan an bagay afrikanis USA, ou viré bò oben kisa ?
Rédigé par : Ayti | 25 mai 2010 à 03:51
Le petit village de marrons au 18ème siècle s'était établi au lieu dit Morne-Congo, c'est n'est pas exactement Bois Lézard.
Rédigé par : Histoire de la Martinique | 25 mai 2010 à 05:52
C'est quoi la maafa hein ?
Rédigé par : MC.59 | 28 mai 2010 à 05:17
"Bèlè li Sid"
Présentation du livre
de Georges-Henri Léotin,
Librairie Alexandre
Samedi 05 juin 2010 - 10h00
Librairie Alexandre,
29 Rue de la République
à Fort de France
Rédigé par : Kanmo Matnik | 28 mai 2010 à 08:12
Et si cette menace d'envoyer l'esclave récalcitrant en Martinique était juste qu'il était difficile de s'évader parce que les serpents trigonocéphales étaient nombreux, Martinique est la seule île où il y a des serpents dans les Antilles.
Rédigé par : Ma.Antha | 30 mai 2010 à 07:29